L'observateur des oiseaux
Le manuscrit Ornithologie est un gros document truffé de dessins et de notes. Il faut noter l’avant dernière planche, n° 68, consacrée à l’empaillement des oiseaux. A cette époque, en effet, la règle était de disposer d’un animal mort afin d’examiner soigneusement toutes les caractéristiques ornithologiques. Le fusil était donc le premier instrument scientifique utilisé par les naturalistes. Ensuite venait l’empaillage et la mise en situation de l’oiseau la plus naturelle possible. La ville de Biarritz et le Museum de Bayonne possèdent ainsi de très importantes collections d’oiseaux naturalisés.
Les oiseaux représentés par Ducourrau le sont à l’échelle de la taille naturelle, ce qui l’oblige à de multiples collages de papier pour disposer d’une surface suffisante, par exemple pour le héron. La détermination spécifique est toujours confortée par l’indication de références bibliographiques, surtout Darracq, mais aussi Risso, Cuvier, Thore ou autres. Le Petit Duc (Hibou scops) fut ainsi capturé par Mr J. Moreau le 22 octobre 1865 à Biarritz ; la référence indiquée est : Risso III, 32 n° 33. Il est indiqué sur la planche : dessin de grandeur naturelle. Certains dessins sont datés de 1855, donc antérieurs à son retour à Biarritz, ce qui montre bien l’enracinement de sa passion de collection et de collation naturaliste. La perdrix fut ainsi “dessinée d’après nature et de grandeur naturelle. 3 octobre 1864, don de M. Eug. Aubert, de Strasbourg”. Les références sont souvent abrégées : M. Darracq, M. Dq, ou explicites : Vu par M.Dq. S’agissant du Catalogue Darracq, le numéro de l’oiseau est indiqué d’après ce document. Les noms vernaculaires en gascon, bas breton, provençal, languedocien, italien sont souvent indiqués. Mais pas en basque, montrant ainsi que Ducourrau avait sans doute peu de rapports avec des naturalistes bascophones.
La colorisation des dessins semble avoir été réalisée par sa fille, pour l’essentiel des documents, le dessin au trait étant toujours de l’auteur.
Certaines planches ne sont pas originales. Ainsi, celle sur les oiseaux de proie, d’après les planches 5, 6 et 7, d’après l’Atlas Buffon. Ce document apparaît davantage comme une sorte d’album, rassemblant des observations morphologiques sur l’oiseau avec indications diverses, que comme un travail réalisé dans une perspective plus scientifique. Il faut dire que l’époque était à la collecte et au rassemblement de données permettant l’établissement d’un classement systématique des espèces et tout concours, même d’un amateur, était utile. De nombreux chasseurs, au fusil ou aux filets, fournissaient Ducourrau et les renseignements consignés permettent de noter beaucoup de comportements humains habituels à cette époque, à côté de notations de pure ornithologie. Ainsi le Loriot jaune mâle capturé le 20 avril 1868 nichait aussi dans le Parc de Grammont à Biarritz “et on en trouve parfois perdus en mer”. L’existence de “filets aux tourterelles”, attesté dans une fiche permettait la capture de beaucoup d’autres oiseaux ; il s’agissait là d’une préfiguration de la capture moderne au filet permettant le bagage des individus et l’apport à la connaissance des phénomènes migratoires, sauf qu’à l’époque on tuait les oiseaux !